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2024 ASU Summer Camp : Une question de principe




On ne raconte pas la magie.

Transmettre ce n’est pas raconter. Et pourtant, il apparaissait pour moi indispensable de confier ce qu’a représenté mon expérience du Washington ASU Intensive Summer Camp 2024, bien qu’intimidée à l’idée formelle d’en faire un article.


Du sentiment d’humilité, de l’émerveillement avant même de se déchausser à l’orée du dojo. De la noblesse des matières odorantes, jusqu’à ce que nos paupières ivres s’inclinent. Une éclipse, puis un concert. Des cohortes de sensations : de notre regard qui se cogne, s’éparpille et trébuche sur tant d’aspérités artistiques. Comment rendre compte de tout cela sans la culpabilité d’inexorablement en aplatir le relief.


C’était une question de principe. Comme il en a été question durant tout notre séjour et comme notre pratique le souligne à chaque keiko. Pour essayer maigrement de remercier le programme qui m’a permis d’en faire l’expérience d’une part. Bien sûr, pour remercier mon Sensei, qui a rendu cela possible. Mais aussi et enfin, pour que d’autres y puisent, peut-être, l’impulsion d’en faire eux-mêmes l’expérience.


Si l’évocation du shobukan dojo convoque indubitablement le champ lexical de l’art, ce n’est pas un musée. Il regorge de vie et semble parfois même respirer, tant au grès des soins minutieux que de la pratique intensive dont il fait l’objet. Le tatami y saupoudre de grâce vos déplacements et réceptionne vos chutes comme on embrasse un ami. La confiance s’y déploie, les appuis s’y enracinent et le jardin vous contemple. La courtoisie y est cultivée jusque dans les vestiaires où le pragmatisme comble le moindre de vos oublis, ou durant les pauses où le soin des pratiquants et de leur santé y est pris très au sérieux. L’accueil qui est fait au Dojo est une véritable manifestation du Musubi. La véritable fourmilière qu’il représente trouve sa force dans l’implication de ses membres. Il devient un choix de vie et certains n’hésitent pas à déménager pour plus de proximité.





Toute la poésie de Saotome Sensei, son savoir-faire et l’impartialité de son regard tapissent le lieu. Sa présence est tout à la fois intimidante, réconfortante et motivante. Son enseignement reste vif et incarné. Durant le stage, Mitsugi Saotome Shihan enseigne à raison d’une heure par jour mais reste présent durant la majorité des autres enseignements dispensés.



La martialité règne, sans brutalité mais avec la franchise de pratiquer un art martial et d’y défendre notre intégrité, notre vie, avec une efficacité que l’on met au service de la clémence. Sans celle-ci, l’indulgence n’est pas un choix. Rien d’inoffensif ne peut faire le choix d’épargner. Sensei le martèle : « defense / offense is one ».


Il nous faut alors condenser, retirer sans alléger, polir, travailler et surtout s’adapter. Être présent et naturel est indispensable car rien de prédéfini ne peut être une solution à une réalité en évolution permanente. La maîtrise technique acquise durant nos longues années d’apprentissage doit être au service de la spontanéité du moment, de notre morphologie et de celle de notre attaquant. L’adaptabilité est au cœur de l’enseignement dispensé.


Si la chaleur et l’amplitude horaire sont de véritables challenges, rien ne peut nous détourner de la gourmandise que représente le programme proposé. Car au-delà de l’enseignement de Saotome Sensei, celui-ci nous délecte de celui de Bill Gleason, Marsha Turner, Lee Crawford, Don Ellingsworth, Gary Small, Eugene Lee, Robert Deppe, Steve Schneid et Kamenna Lee.


Le pratique est exigeante, dynamique et variée. Les armes, loin de s’assoupir aux berges du dojo y font l’objet d’un travail minutieux.  Jo, bokken et nitten aiguisent notre apprentissage et illustrent les principes fondateurs ainsi que la créativité de Saotome Sensei. Tapissant littéralement les murs du Dojo, ils sont autant ses protecteurs que les témoins de notre pratique, et il en émane une énergie particulière.


Au total presque 30 heures de pratique réparties sur 5 jours, mais également des événements durant lesquels nous pouvons célébrer et échanger autour d’un verre et d’un bon repas sont prévus.





Ce voyage est également celui d’un Dojo. Si L’enseignement de l’Aïkido club du Baou est basé sur la transmission de celui de Saotome Sensei tout en respectant le courant français depuis sa création, c’est en 2018 que le dojo officialise cet héritage en rejoignant l’Aïkido School of Ueshiba. J’imaginais donc ce voyage comme un moyen de rendre encore plus concret cette filiation.  Le stage anniversaire du Vigan avait tenu lieu d’incipit à ce récit à venir. Nous avions eu la chance d’y recevoir l’enseignement de Saotome Sensei et d’Ikeda Sensei dans l’écrin naturel qu’est le site du Vigan.


Bien au-delà de la pratique, l’amitié a été au cœur de ce voyage. Le partage y a été immense : toute l’amitié que je porte à notre équipage a été un socle solide à ce projet. Les fous rires, les découvertes, les ripailles ont été légion. Un immense merci à vous les garçons pour votre bonne humeur et votre optimisme : votre compagnie a été, comme toujours, précieuse. Et je souhaite à tous d’avoir un capitaine de navire qui prenne le temps de nous faire découvrir la ville avec toute la délicatesse de son expérience personnelle, de toujours être à l’écoute de vos préoccupations tout en vous incitant à dépasser les limites de votre confort. Pour tout cela : Merci Stéphane. À nos hôtes : l’accueil sur place n’aurait pas pu être plus parfait et votre amitié nous est précieuse.




A l’issue du stage, l’esprit est en ébullition et de cette cotonneuse sensation de plénitude qui enrobe les corps repus, émerge une réflexion aux allures d’épiphanie :  durant toutes ces heures d’enseignement reçues, à aucun moment le nom d’une technique n’aura été prononcée. Seuls les principes ont été convoqués.

Peut-être est-ce cela qu’il faudra retenir.



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